Le chainon manquant

Les "faux départs" du renouveau de la boha

Au cours du XX° siècle, plusieurs personnes ont tenté de renouer avec la boha, de sauvegarder sa culture. Pour diverses raisons, ces tentatives n’obtinrent pas la répercussion publique qu'elles méritaient, jusqu'à nos jours. Ces démarches ne furent pas vaines, car elles maintinrent de fragiles liens et constituent aujourd'hui de précieux témoignages pour les chercheurs.

Quelques tentatives

1930 Pierre Toulgouat fait exposer des instruments au musée d'Hossegor

1945 - Monsieur Joseph Barsacq copie "de visu" l'instrument de Jean Lestage (ci-dessous)

1960 Campagne d'ethnomusicologie de Claudie Marcel Dubois en Gascogne

1970 Geo Lasserre cherche à reproduire un instrument de François Mivielle

1966 à 1985 Marcel Gastellu et Charles Alexandre entreprennent des recherches très complètes, qui ne sont révélées qu'en 2006.



A la recherche du chaînon manquant

La transmission orale traditionnelle de notre instrument s’est malheureusement éteinte avec le dernier sonneur pré-revivaliste 70’ : Guillaume Justin ‘Jeanty’ Benquet de Bazas (1870-1957). Il n’a pas eu, à notre connaissance, d’élève pouvant perpétuer ce savoir ancestral.

Il reste néanmoins un témoin d’époque qui s’est essayé à la facture et au jeu de la Boha : il nous livre son expérience. Extrait d’une rencontre à Mont de Marsan chez M. Joseph Barsacq.

Entretien réalisé par Jean-Claude Dupouy et Jean-Pascal Leriche le Samedi 25 Février 2006.

Joseph Barsacq

« … Je m‘appelle Joseph Barsacq, je suis né en 1922 à Brocas (40). J’avais été voir Lestage 6 au Sen, joueur de cornemuse landaise ancien et j’avais fait la Boha !

Il va chercher l’instrument conservé dans un carton : une Boha complète type ‘5 trous’ avec fente sur le côté ;  elle n’est pas en état de jeu. (7)

Il faut que je refasse le brunidèir (il n’y en a pas)… J’avais fait tourner le bois chez un fabricant de chaise qui avait le tour à pédale d’autrefois avec une ficelle d’entraînement, à Brocard chez Dupouilh, dans de la bûchette de cerisier.

Et les anches, c’est du roseau !
- Et la perce ?
Avec une chignole à main (percé) de chaque côté, et la soupape : un morceau de cuir !
- En quelle année vous l’avez faite ?
Je l’avais faite en (19)45 et (je l’ai utilisé) jusqu’en 60, et moi je marquais le rythme en pressant sur la poche avec le groupe folklorique « les Esquirols », je ne savais pas la musique (il chante un rondeau) : Qui t’a carga la gala… autrefois on dansait au «truc de l’esclop » il me semble que je vois encore le bonhomme…
- Mr Lestage il jouait bien de la cornemuse, vous l’avez vu jouer ?
Non… mais j’avais été chez lui (pour copier la cornemuse), je l’avais vu, ça avait été du travail pour faire ça !.. Et la poche : une peau d’agneau (donné) par une bergère du coin : elle a une fille à St Avit et l’autre à Roquefort. Elle me l’avait tanné et il y a encore le poil à l’intérieur non tondu. C’est du passé tout ça : la Boha en patois, je la laisserai peut-être au musée des Forges à Brocas… »

6) Jean Germain Lestage cultivateur, né le 11/10/1869 à Brocas (40) et décédé au Sen de Labrit (40) le 16/05/1953. Bohaire de l’âge de 12 ans à 78 ans.Il a joué avec le groupe « Les Landais »


7) Il ira plus tard chercher une ébauche d’une seconde Boha de son cru, ainsi qu’une flûte à bec d’écolier en bois manufacturée.
Transcription Jean-Pascal Leriche

M Barsacq avec le groupe "los Esquirols" en 1950
M Barsacq avec le groupe "los Esquirols" en 1950
Joseph Barsacq à Uzeste 2006 montre comment il utilise sa boha
Les rondeleurs de Brocas et M Jean Lestage à Mont-de-Marsan (la petite Gironde)
Les rondeleurs de Brocas et M Jean Lestage à Mont-de-Marsan (la petite Gironde)